2.02.2010

Mosto: petit mais costaud!



Découverte sur le conseil d'Alex, manager du restaurant de l' hôtel G, d'une bien jolie table pékinoise, tenue par un chef Vénézuélien, associé à un directeur de salle italien - mazette! jolie migraine globalisée en perspective? Goûtons plutôt!


Comme le formulait si bien ce cher Poe traduit par ce non moins cher Mallarmé: c'était en le glacial décembre. Pour nous réconforter, nous choisîmes le "December Tasting Menu" à 38€, autant dire une petite fortune pour le chinois moyen, un prix acceptable pour l'expatrié de base, une broutille pour qui dîna un jour chez Alain Passard ( choisis ton camp, camarade! Sauf si tu es un vrai "camarade, auquel cas tu n'as pas le choix, tu es vraisemblablement dans la catégorie numéro un, celle du Pékin moyen! )


Nous entrons, après un dédale improbable de couloirs de centre commercial agrémentés d'ascenseurs capricieux, dans une jolie cantine chic, chandelles en chaque recoin et plus encore, douce et sombre entre les flamèches. C'est très mignon, assez cliché européen ( dans le genre poussons la porte d'un restaurant français à San Francisco, ou à Berlin, eh oui, ce sont les mêmes! ).


A table, service aimable et professionnel, belle verrerie, six plats à venir, très belle carte des vins du monde. Au hasard ou presque: Crozes-Hermitage petite ruche de Chapoutier 2007 à 41€, Nero d'Avola Chiarramonte de Firriato à 26€, bon Grüner Veltliner de chez Brundlmayer et sélection pointue d'Albarinhos du Rias Baixas ( de 33 à 66€), variété/pertinence/prix très au-dessus de la moyenne pékinoise.




Au menu:


Tataki de thon, sauce tamarin-soja, chips de patate douce et roquette


Filet de Canard mariné à la citronnelle, oranges, frisée et caviar citrique


Risotto truffé au vin rouge, tuile et bouillon de parmesan



Saumon rôti, riz aux champignons séchés, sauce crémeuse aux moules, salade de pomme verte


Agneau braisé longuement, légumes rôtis et pommes de terre au romarin


Panna Cotta aux fruits de la passion, chocolat crémeux, mousse de banane et pistaches rôties


et en rappel (pas sur le menu, donc)


Soufflé au chocolat et glace au poivre du Sichuan




Tout cela fut très bon, même si notre palais européen a pu déplorer une légère dominante des condiments asiatiques dans les entrées ( sauce soja pour le thon, gingembre et oyster sauce pour le canard ). Ces deux premières entrées nous ont paru un brin consensuelles, la proposition ne nous semblant pas assumée jusqu'à terme. Le caviar citrique inspiré des sphérifications Elbulliennes qui prolifèrent ces temps derniers dans les assiettes gastronomiques ne nous ont pas éblouis, même si plus appropriées ici que souvent ailleurs ( chez Arzak, par exemple ). Quelques réserves magistralement balayées par l'ouragan du risotto, cuisson inimitable, arômes profonds, et, vraie cerise sur le gateau, un bouillon au parmesan du tonnerre, judicieusement anisé, qui fait bénéficier d'un salutaire apport de fraîcheur un plat qui sans lui friserait la saturation aromatique. Un vrai grand plat de chef, intelligent et intuitif, cérébral et animal, à la fois riche et aérien. Une merveille.


Suivront deux plats: le saumon à la cuisson exemplaire qui offrira un imprévisible mais impeccable accord avec notre vin rouge - une fois encore nos habitudes nous feront douter de la nécessité dans un menu dégustation de deux plats contenant du riz, mais il semble que nos voisins chinois n'y trouvent rien à redire - et l'agneau, viande confite à la belle persistance, mais avec une garniture ( les légumes ) manquant vraiment de relief, molle, sans peps. C'est pour nous la seule fausse note du menu; dans ce plat nous aurions aimé plus de contraste, des agrumes peut-être, davantage de fraicheur sans aucun doute.


Desserts de haut vol, la panna cotta est divine avec sa myriade de petits satellites complémentaires, et la glace au poivre de Sichuan qui accompagne le soufflé au chocolat ( assez bon, mais techniquement c'est plutôt un coulant, à la rigueur un fondant ) est à couper le souffle, une conclusion sagace et bienveillante comme un clin d'oeil pimenté.




Accueil mieux que charmant, à la fois pro et complice, discussion finale avec un chef humble et aguerri, l'ensemble du moment passé fait que nous y sommes retournés deux jours plus tard, et que nous y retournerons les yeux fermés, dès que possible. Avec la sensation de retrouver des amis bourrés de talent et pétris d'humanité. Vous pouvez en dire autant de beaucoup d'endroits, vous?


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